Comme promis lors d'un article précédent, vous allez raconter dans le moindre détail votre ascension du Kilimandjaro.
Mais....
Pour celles et ceux qui veulent une version allégée de cette aventure (et qui n'ont pas envie de se taper tous les délires de votre serviteur...honte sur eux...), ça donne à peu près ça :
Marche....beaucoup de marche.....bonne fatigue.....
Mal des montagnes quasi inexistant pour moi
Dernière ascension complétement irréelle où tu ne sais plus qui tu es et où tu vas (mais tu te souviens par contre de casser la gueule à la pétasse qui t'a entraîné dans cette galère)
Moment émouvant quand tu arrives en haut. L'impression de s'être dépassé. Comme jamais.
Grande joie et sentiment d'être The King of The World
Envie d'embrasser la pétasse qui vous a permis de vivre cette inoubliable expérience
Redescente vers les nuages en étant sur un p'tit nuage.
Bon safari tranquillou pour finir
Et pour ceux qui n'ont que ça à foutre qui sont polis et vont lire toute votre prose... C'est parti !
Bien évidemment, ceux qui vous connaissent savent maintenant que les faits seront exagérés, déformés, embellis (lorsqu'ils s'appliquent à vous) et sournoisement ré-arrangés (lorsqu'ils concernent les autres) (petite dédicace spéciale pour Fred et Pat, les derniers envahisseurs, surlesquels vous vous êtes quand même pas mal défoulés lors de l'article les concernant. Vous avez exagéré beaucoup de faits...Ce qui vous a bien fait rire en écrivant mais n'a peut-être pas donné une image réelle de leur séjour ici. Vous tenez donc à vous excuser officiellement devant les milliers centaines dizaines quelques lecteurs qui vous lisent ! Et aussi rétablir la vérité : Patricia ne passe pas son temps à boire des bières... (elle boit aussi des rhum arrangés))
Voilà, maintenant que vous avez la conscience en paix, vous allez pouvoir narrer cette aventure à la con formidable expérience vécue grâce à votre ex-amie Florence.
Vous partîtes donc frais et guilleret un beau matin de Mayotte.
Accompagné par votre cher et tendre.
Qui a tenu à vous déposer lui-même à la barge (peut-être pour être sûr que vous alliez bien partir...).
Pas de stress au niveau des horaires car :
- vous êtes un angoissé des voyages et vous arrivez en général avec 8 heures d'avance dans les aéroports (ça marche aussi avec les gares) (mais bizarrement pas pour les rendez-vous chez des copains...ce qui a tendance à agacer votre moitié lorsqu'il constate que vous vous mettez à nettoyer la poubelle à 2 minutes du départ)
- Kenya Airways a décidé de décaler son vol d'une heure et demie (sans vous avertir) (certainement pour que vous ayez le temps de prendre un 5ème café avant le décollage)
Décollage.
Vous êtes en classe affaires. Vous ne savez pas trop pourquoi. Mais du coup ça vous rend tout joyeux et atténue un peu l'immense et incommensurable peine dûe à l'abandon de votre conjoint sur l'île. Il vous a néanmoins promis de venir vous chercher immédiatement, où que vous soyez, si vous êtes en danger extrême. (vous auriez dû lui demander ce qu'il sous-entend par "extrême"... et si le fait d'être courtisé par une Tanzanienne qui a absolument voulu être prise en photo avec vous allongés sur un transat au bord de la piscine de l'hôtel (véridique!), rentre dans cette catégorie de danger...)
Un peu avant d'arriver à Naïrobi vous apercevez ça par le hublot :
Et là, subitement, ça fait un peu gloups à l'intérieur de vous.
Vous le contemplez un peu comme un adversaire mais avec un respect total.
Vous vous apercevez que ça a l'air très très haut puisque ça a l'air très très proche de votre avion.
Vous comprenez que le Kili, ça se mérite.
Vous regrettez de ne pas avoir finalement fait votre testament avant de partir (vous en aviez parlé à l'Homme-qui-partage-votre-vie mais ça l'avait bien fait rire...et du coup vous ne l'avez pas fait. Tant pis pour lui, si vous mourez, il n'aura rien !)
Vous réalisez que vous allez en chier.
Vous songez à aller voir le pilote pour lui demander de faire demi-tour en lui expliquant que non finalement vous n'en avez plus trop envie et qu'il vaut mieux abandonner le truc (mais quand la gentille hôtesse viendra vous demander si vous souhaitez quelque chose vous répondrez bêtement "a coke please" au lieu de "yes, I would like to ask the flying-man to do demi-tour because I am flipping my race")
Vous arrivez à Naïrobi. Vous avez maintenant 1h30 pour trouver le comptoir de transfert afin d'obtenir votre autre billet d'avion qui vous permettra d'embarquer sur la compagnie "Precision air service" qui vous conduira jusqu'à Kili airport.
La musique de Fort-Boyart se déclenche dans votre tête...
Mais il faut croire que vous êtes devenu un grand voyageur (ou que Passe-Partout est votre ange gardien) (aucun rapport avec la taille...), en un rien de temps, vous vous retrouvez au bon endroit, dans la bonne file, devant un gentil Kenyan qui comprend tout de suite "qui-vous-êtes-où-vous-allez-d'où-vous-venez-et-quel-est-votre-signe-astrologique" !
(bon...en fait, vous aviez l'air tellement désemparé qu'une gentille grosse dame noire est venue directement vers vous, a tenté de communiquer dans une langue incompréhensible (de mémoire : "Hi! How are you? Can I help you ? .... certainement un dialecte local d'une tribu Kenyanne...) et devant votre air ahuri, vous a pris votre billet des mains, a hoché plusieurs fois la tête et vous a fermement empoigné et placé devant le monsieur Kenyan, lui a parlé dans son drôle de langage puis s'est tourné vers vous et vous a dit avec un grand sourire : "It's ok, don't move!". Vous avez hoché la tête en faisant également un grand sourire. Puis le monsieur vous a donné votre billet d'avion et avec plein de gestes, vous a indiqué où il fallait aller.
Vous décidez que les Kenyans sont des gens charmants et attentionnés et sous l'oeil affolé du monsieur vous partez dans la direction opposée à celle qu'il vous a indiquée car quand même il faut bien aller faire pipi avant d'embarquer.
Vous arrivez à Kili airport.
Durant le vol vous avez scruté tous les passagers, persuadé qu'ils venaient tous pour gravir le Kilimandjaro. Mais que eux en sont bien plus dignes que vous. (Surtout les deux grand prétentieux d'américains (1m80, baraqués, sportifs et jeunes...(qu'ils tombent dans une crevasse et qu'ils crèvent)) qui se la pétaient avec leurs belles chaussures de rando et leurs sac-à dos de pros et qui devaient certainement se foutre de vous dans leur langage incompréhensible...(qui ressemble étrangement au dialecte Kenyan de la grosse dame de l'aéroport...)).
Vous décidez de les ignorer durant la fin du vol.
A l'arrivée, après avoir rempli une montagne de paperasses et payé votre visa, un gentil monsieur vous emmène à Arusha dans votre hôtel de transit. Là où vous allez attendre que Florence vous rejoigne le surlendemain.
Une journée et demie à glander dans un superbe hôtel avec piscine.
Piscine dans laquelle vous avez refusé de mettre ne serait-ce qu'un doigt de pied ne voulant pas finir congelé...
Il fait froid en Tanzanie...
Heureusement vous aviez prévu le coup ! Vous enfilez votre polaire et votre super veste "wind-stopper-top-la-frime" et, armé d'un bon gros bouquin, vous attendez que le temps passe. Et le temps passa lentement... Mon dieu que vous vous êtes fait chier ! Votre seul distraction et but de la journée était le passage au restaurant et vos tentatives de communication avec les serveuses (qui allaient parfois en cuisine chercher l'ingrédient que vous n'arriviez pas à comprendre en anglais afin de vous éclairer dans le choix de votre commande!).
Heureusement, le samedi, à l'heure exacte, vous voyez débouler votre amie métropolitaine en pleine forme et prête à en découdre avec cette petite montagne ! Vous lui demandez quand même si elle a vu par la fenêtre de l'avion à quel point ça avait l'air haut et si ça ne l'effraie pas... C'est là que vous apprenez qu'elle s'est endormie 5 minutes après le décollage et réveillée 5 minutes avant l'atterrissage. Et que du coup elle a loupé et la vision du Kilimandjaro et le repas dans l'avion. Et du coup elle a très faim. Et "où-il-est-ce-putain-de-restaurant-je-crève-la-dalle !!!??"
Prudent, vous lui proposez les fruits secs que vous aviez prévus lors de l'ascension....
Par la suite, vous faites connaissance du reste du groupe. Et ma foi, il se révélera un groupe bien sympathique.
Le guide vient vous faire son speech. Vous comprenez soudainement que c'est bien réel et que c'est pas juste une grosse surprise avec des gens qui sortent de derrière les buissons en disant "non ! on déconne! on va quand même pas grimper en haut du Kilimandjaro ! C'est juste pas possible !".
Personne ne déconne.
Vous allez tenter de grimper en haut du Kilimandjaro.
C'est complétement fou.
Dernière nuit dans l'hôtel avant le départ.
Dans votre lit, vous n'êtes pas très serein et avez du mal à vous endormir (ceci n'a rien à voir avec le fait qu'une femme partage votre lit, ce qui n'était pas arrivé depuis bien longtemps)
Le lendemain c'est le grand départ.
Direction la porte Machame. Il existe plusieurs voies pour gravir le Kilimandjaro et apparemment vous avez choisi (on vous a imposé) la plus dure...mais la plus belle !
Petite photo souvenir du moment où vous étiez tous à peu près frais, propres et naïfs confiants !
Alors, que les lecteurs se rassurent, vous n'allez pas écrire dans les moindres détails le récit de vos marches. Ce serait terriblement chiant (vous tenez d'ailleurs à féliciter les lectrices et lecteurs qui sont arrivés jusqu'à ce point du récit en ayant tout lu!)
Que faut-il retenir ?
Que vous êtes un gentil garçon bien obéissant....
Le guide a dit "polé-polé" (environ 514 fois). Mot swahili qui signifie en français: doucement.
Le guide a dit : il faut boire beaucoup ! Expression française qui signifie en français : il faut beaucoup boire.
Alors vous, vous avez marché très lentement. Mais alors vraiment très lentement... Ridiculement lentement. Que même votre grand-mère ardéchoise elle aurait donné l'impression d'être Bip-Bip l'oiseau à côté de vous. (vous refusez par contre d'être assimilé à un coyote.)
Et vous avez bu. Tout le temps. Des petites gorgées régulières. En plus des longues gorgées lors des arrêts. Vous avez bu environ 4 litres d'eau par jour sans compter les nombreux thés et les soupes qu'on vous a obligé à avaler lors des repas.
A boire autant, forcément vous pissâtes sans arrêt.
Si l'on considère qu'un mâle définit son territoire par son urine, on peut dorénavant penser qu'une bonne partie du Kilimandjaro vous appartient...
Arrivé à votre premier campement, après environ 6 heures de marche, vous avez la surprise de constater que les porteurs ont déjà installé toutes les tentes (bénis soient-ils) et préparé une petite bassine d'eau chaude pour que vous puissiez vous laver (les traîtres !).
En effet, vous aviez intégré le fait que vous ne pourriez pas vous laver pendant 6 jours. Au début vous avez été horrifié et puis finalement l'idée a fait son chemin et ça a fini par vous plaire ! (il y a un petit cochon qui sommeille en vous...)
Du coup, en voyant cette bassine d'eau chaude, cela vous a désorienté. Que faire ? Vous avez discrétement maté observé les autres mâles du groupe. Vous avez constaté avec effroi qu'ils se sont mis torse nu pour faire leur toilette.
Bon.... Vous avez discuté ferme avec Florence, lui avez expliqué que, venant de contrées où il fait 28° minimum, vous ne pouvez pas prendre le risque de subir un choc thermique en vous dévêtant. Et que par conséquent, vous étiez partant pour une hygiène minimaliste laissant s'exprimer vos effluves corporelles en toute liberté.
Votre compagnonne de voyage, qui est une grosse crade, a accepté et vous a même suivi dans votre idéologie intitulée "épargnons notre corps en le frottant le moins possible avec toutes ces cochonneries de savons pourfendeurs d'épiderme".
Vous avez pué tous les deux pendant 6 jours.
Sur la photo ci-dessus, des porteurs. (et tout en bas une mer de nuages!)
Ces mecs sont des oufs ! Ils portent des kilos de bagages, ils foncent et escaladent les chemins que vous parcourez "polé-polé" (qu'en est-il du mal des montagnes pour eux ???). Tout ça pour un salaire de misère évidemment. Vous décidez d'être généreux dans vos pourboires parce que quand même, hein !
Respect pour ces mecs.
En plus ils sont aux petits soins pour vous et d'une gentillesse que vous espérez sincère !
Vous avez été fort surpris lors de votre premier réveil sous tente. Alors que vous étiez à moitié congelé dans votre duvet et cherchiez des mots pour expliquer à votre copine-bourreau à quel point elle avait eu une idée à la con en vous embarquant dans son trip, un gentil grand black Tanzanien est venu vous réveiller en vous apportant un thé chaud !
Dans votre tente ! Dans votre duvet !
Rhôôoooo ! Vous êtes tombé amoureux sur le champ.
Vous avez remercié le Grand-Beau-Black-Tanzanien-Futur-Homme-de-Votre-Vie.
Vous en avez profité pour constater que Jamais l'Homme-Actuel-de-Votre-Vie ne vous avait apporté un thé chaud au lit..... Triste constat.
Vous décidez de remplacer Pierre par le Grand-Beau-Black-Tanzanien dès votre retour.
C'est lors de ce premier matin que vous avez aussi compris plusieurs choses (n'étant pas habitué au camping, il y a des réflexes qui vous échappent) :
- Toujours dormir avec ses affaires du lendemain (sur soi ou juste dans le duvet), ce qui évitera de pousser des petits cris ridicules en enfilant son pantalon le matin. Pantalon raidi par le froid et en contraste total avec la température de votre corps.
- Toujours dormir avec son appareil photo et son téléphone portable, ce qui évitera de perdre 4 petits-bâtons-témoin-de-batterie sur les 5 que vous aviez la veille. A votre grande surprise le froid décharge les appareils (encore un phénomène magique à élucider quand vous n'aurez rien d'autre à faire) (c'est-à-dire jamais)
Mais étrangement, quand vous sortez la tête de la tente, puant, frigorifié et l'haleine pâteuse, face à ce qui vous attend (voir photo ci-dessous), vous êtes heureux...
La flèche indique l'endroit où vous êtes censé aller...
Vous avez parfois des moments de découragement en vous disant que vous n'y arriverez jamais...
Les journées passent vite. (forcément, à l'allure où vous marchez !)
Et plus vous grimpez dans les hauteurs, plus vous comprenez l'histoire du "polé-polé" !
Surtout quand, pour aller aux toilettes, vous êtes obligé de faire une pause en chemin alors qu'elles sont à 30 mètres... Vous aviez oublié d'y aller polé-polé, vous avez marché normalement (pauvre fou), vous êtes essouflé comme si vous aviez couru un marathon !
Pareil lorsque vous devez replier votre duvet le matin et faire votre sac. Vous faites tout au ralenti parce que...vous n'avez pas le choix puisqu'il y a de moins en moins d'oxygène.
Dans le groupe, certains ont des maux de tête, d'autres des nausées. Du coup, comme vous êtes un grand trouillard, vous continuez à avancer polé-polé (voire polé-polé-polé!) et à boire comme vache qui pisse (euh...vous avez une incertitude sur l'emploi de cette expression...???)
Ci-dessus une petite vue d'un des camps (mais vous ne savez plus trop lequel...si des lecteurs cherchent des informations précises sur l'ascension du Kilimandjaro, il vaut mieux chercher d'autres blogs beaucoup plus ennuyeux sérieux que le vôtre!)
Un après-midi, vous en profitez pour envoyer un petit texto à votre Homme-des-îles.
Histoire de vérifier si tout va bien (et s'il n'est pas mort d'amour en votre absence). Vous envoyez un texto tout simple (même écrire un texto vous épuise tellement vous êtes en altitude). Dix minutes après, sa réponse vous parvient (il n'était donc pas mort d'amour mais devait certainement être en train d'agoniser et votre texto lui aura redonné une raison de vivre).
Rhôôôooo ! Sa réponse est tellement belle que vous en rosissez de bonheur à côté des toilettes ! (oui, c'est le seul endroit où ça captait).
Du coup vous décidez de ne pas le remplacer par le Grand-Beau-Black-Tanzanien. (mais vous vous promettez quand même de mettre cette histoire de thé au lit dans une discussion quelconque à venir)
Et vous repartez pour de longues heures de marche. Silencieuses. Car en altitude, vous ne pouvez pas parler en marchant! Vous avez essayé une fois et vous avez eu mal à la tête tout l'après-midi !
Vous marchez, vous buvez, vous pissez, vous marchez vous buvez, vous pissez, vous marchez, vous ... bon, vous avez compris le principe !
Et, chaque midi, votre tente-repas vous attendait. Avec à chaque fois un cuistot qui se surpassait pour vous faire des plats chauds et bons. Vous êtes conscient que c'est sûrement grâce à toutes ces petites attentions que vous avez pu aller jusqu'au sommet.
Vous décidez que les guides, les porteurs et le cuistot sont devenus vos meilleurs-amis-pour-la-vie.
Et l'ascension continue... Mais il est temps de résumer parce qu'il n'y a certainement plus qu'une seule lectrice qui a supporté de lire toutes vos bétises (votre mère...).
- Le Mal Aigu des Montagnes continue de vous épargner (Fuck The MAM !). Sauf le jour de l'ascension finale (4600m d'altitude), vous vous êtes réveillé avec l'impression qu'un maki vous serrait la tête comme si c'était une banane...
- Florence a choisi les symptôme "nausée" + "mal de crâne" dans la liste des effets du MAM. Elle souffre mais en silence. C'est une fille courageuse... (vous ne lui proposez cependant pas de porter son sac comme vous lui aviez pourtant promis car...vous en êtes bien incapable à ce stade de l'ascension!)
- Les autres personnes du groupe souffrent elles aussi de divers maux de tête et/ou nausées et/ou diahrées mais personne ne se plaint vraiment. Vous formez vraiment un groupe très courageux...
- Il fait froid. Plus vous montez, plus il fait froid. Surtout la nuit... Vous réalisez que vous ne pouvez plus envisager de vivre dans un pays où il fait froid... Plus qu'un an avant le retour en métropole. Où apparemment il fait de plus en plus froid l'hiver et il fait même froid l'été. Ça ne va pas être possible. Vous décidez de lancer un ultimatum à la métropole : Soit les températures redeviennent normales (un peu froid en hiver et chaud en été), soit vous vous expatriez à nouveau et la métropole n'aura qu'à pleurer votre absence.... (il faut savoir être ferme...)
- Tous vos gestes de la vie quotidienne sont lents... pas le choix sinon votre coeur s'emballe (et rien à voir avec l'amour!)
Puis vient la dernière ascension. The killer-one ! Celle que tout le monde décrit comme un cauchemar !
C'est un cauchemar...
Le jour J, dîner à 18h00, coucher à 19h00 et lever à 23h00.
Vous avez peur de ne pas réussir à dormir mais à peine le temps de formuler vos angoisses, vous sombrez dans un sommeil profond.
Quand votre ex-petit-copain, le Grand-Beau-Black-Tanzanien vient vous réveiller, vous avez l'impression que vous venez juste de vous endormir...
Vous vous habillez dans un silence quasi-religieux en empilant des couches et des couches de vêtements censés vous protéger contre le froid (et ils y parviendront ! louée soit votre pétasse de copine Florence qui vous a acheté des fringues de qualité à des prix défiant toute concurrence!).
Vous sortez et rejoignez la tente-repas où vous prenez une légère collation. Certains ne mangent pas beaucoup. Nausées ? Appréhensions ? Ras-le-bol de ce putain de thé que vous avez bu 4 fois par jour depuis 5 jours ?
Et vous démarrez.
De nuit, éclairé par votre frontale. A la queue-leu-leu. Vous suivez la lumière qu'il y a devant vous. Et vous grimpez, montez. Vous perdez la notion du temps. Quand la personne devant s'arrête, vous butez contre son sac et, l'espace de quelques micro-secondes, vous vous endormez la tête posée sur son sac. Les guides imposent le rythme et font des pauses régulières. A chaque pause, vous essayez de boire, de faire pipi (mais où est-donc passé votre zizi ? A 5500m d'altitude et dans un froid décapant, vous pensez un moment l'avoir perdu...).
Pendant les pauses, les guides soufflent dans les gants, frottent les dos, rajustent les capuches. Vous savez bien que vous ressemblez à des loques humaines mais franchement, vous ne pouvez pas faire autrement.
Et les guides se remettent en route. Ils tiennent à arriver en haut pour le lever du soleil. Vous êtes dans un tel état que vous n'en avez plus rien à foutre du soleil. De toutes façons vous n'arrivez pas à aligner deux pensées cohérentes. Vers la fin de l'ascension vous êtes même pris de vertiges. Vous lancez votre jambe en avant mais bizarrement elle part sur le côté. Vous êtes saoul sans avoir bu la moindre goutte d'alcool. Quel gâchis...
Mais vous continuez à avancer.
Ça vous semble interminable. Vous ne savez pas quelle heure il est. Les guides refusent de vous dire si on est bientôt arrivé. En levant la tête vous voyez des farandoles de lumières qui avancent. Vous les confondez avec les étoiles.
Vous ne pouvez pas parler. Vous pouvez à peine penser. Vous pouvez juste marcher en tentant de garder l'équilibre. Vous avancez. Encore et encore.
Le soleil se lève.
Et à un moment, sans vraiment l'avoir vu venir, vous arrivez à Stella Point. Et là, vous savez que c'est gagné. A partir de là, il n'y a presque plus de pente. Il faut juste marcher encore 40 minutes pour arriver à Uhuru Point. Mais le plus dur est derrière vous.
Vous vous souvenez qu'en lisant les blogs vous étouffiez des rires en lisant ce que les gens écrivaient. Les arrivées en larmes. Le côté mystique. Vous vous étiez promis de ne pas tomber dans ce sentimentalisme neu-neu si vous arriviez en haut.
Sauf que....vous n'aviez pas prévu que le soulagement d'être arrivé en haut ajouté à la fatigue cumulés au fait que vous aviez la photo de l'Homme-de-Votre-Vie bien au chaud contre votre coeur déclencheraient une vague d'émotions incontrôlables en votre for intérieur.
Des larmes coulent derrière vos lunettes de soleil. Vous pleurez comme le gros neu-neu sentimental que vous êtes...
Pfff... Ridicule....
Arrivé au point culminant (5895 mètres), vous attendez que votre compagne des grandes aventures vous rejoigne. Vous l'entendez d'ailleurs arriver plus que vous ne la voyez vu qu'elle halète telle une femme sur le point d'accoucher, depuis au moins 3 heures !
Mais elle est là. Et vous aussi.
Et vous faites cette putain de photo souvenir de cette putain de dure journée durant laquelle vous avez vécu cette putain de belle aventure ! (vous êtes grossier quand vous êtes ému...)
Et les paysages ?
Fantastiques.... Enfin, c'est ce que vous pensez car il y avait un tel brouillard que vous n'avez pas vu grand chose !
Et les photos de là-haut ? Et le soleil qui se lève sur les nuages ?
Euh...vous aviez espéré que les autres membres du groupe feraient de supers photos arrivés là-haut.
Vous n'aviez pas prévu que tout le monde espérerait la même chose...
Toutes les photos sont donc dans votre tête ! (et vu votre mémoire de poisson rouge, vous êtes bon pour recommencer le Kilimandjaro dans 5 ans...)
Mais bon, vous ne vous êtes pas éternisé là-haut. D'ailleurs les guides ne vous laissent pas le choix
(y aurait-il un danger ? un phénomène d'accoutumance qui fait qu'au bout d'un moment on ne veut plus redescendre ? Mystère...)
Et c'est parti pour 5 heures de descente avec un dénivelé de 2900 mètres !
Vos genoux n'ont guère apprécié...
Vous seriez bien redescendu à toute vitesse avec les autres membres du groupe mais vous avez senti que Florence était fatiguée et, en bon gentleman que vous êtes, vous avez réduit l'allure pour faire une descente que vous appellerez "contemplative" !
(Evidemment, Florence serait là, elle hurlerait qu'en fait vous ne teniez plus debout, que vous étiez aussi crevé qu'elle et que vous vous êtes vautré comme une m.... environ 5-6 fois dans les graviers sous les soupirs silencieux et polis du guide resté avec vous qui a vite compris qu'il mettrait deux fois plus de temps que son confrère à rentrer au camp !)
La photo souvenir ! (estimez-vous heureux de ne pas avoir les odeurs qui vont avec ! )
Et puis enfin, le retour à l'hôtel le lendemain.
Où, en bons sportifs que vous êtes, vous vous êtes jetés sur la bière locale pour fêter l'exploit !
(notez que Florence a deux bières posées à côté de son diplôme alors que vous n'en avez qu'une dans les mains....)
Quant à la suite du séjour en Tanzanie, pas de gros bla-bla (qui a dit "ouf !" ...????)
Juste quelques commentaires bien choisis (qui a dit "Oh non !" ...????)
Vous avez vu plein d'animaux. De très près.
Parfois de trop près !
Vous n'avez pas eu le temps d'expliquer à votre compagne de safari que ça ne sert à rien de mettre ses mains comme elle fait si elle ne met pas une paire de jumelles au milieu...
(les blondes continuent à vous étonner...)
Là, c'est le moment où vous avez bataillé ferme. Vous avez dû expliquer à Florence qu'il était hors de question d'adopter un petit hippo et qu'il ne serait pas heureux dans son appartement parisien.
Ci-dessous, la montagne des dieux, située en pays Massaï.
Elle s'escalade.
Vous avez été tenté et vous aviez commencé à ressortir toutes vos chaudes affaires-qui-puent de votre sac.
Puis le guide-Massaï a expliqué concrètement en quoi consistait l'ascension et vous avez remis tranquillement au fond de votre sac vos chaudes affaires-qui-puent !
Florence a estimé que c'était aussi bien, qu'il valait mieux rester sur une victoire et qu'elle était trop jeune pour mourir.
Poursuite du safari.
Votre barbe pousse. Mais vous n'avez pas envie de vous raser. Vous prenez plaisir à vivre comme un sauvage.
Même les douches des campings ne vous attirent pas.
Jusqu'à ce que Florence vous dise un jour : "Dis-donc, tu pues !"
Vous pensiez qu'elle rigolait et vous lui avez répondu une connerie quelconque.
Mais le soir, elle est revenue à l'attaque et là, les yeux dans les yeux, le plus sérieusement du monde, elle vous a dit : "Non mais Didier, là, vraiment, tu pues...!"
Vous avez alors compris que votre nuit sous la tente était compromise et que c'était soit la douche, soit la nuit à la belle étoile avec les hyènes et les lions qui risquent de vous dévorer (s'ils arrivent à passer outre votre odeur)
Alors, la mort dans l'âme, vous vous douchâtes....
Quelques girafes qui observent de loin les splendides touristes que vous êtes.
Un guerrier Massaï sous un envol de flamants roses.
(ce n'est pas flagrant sur la photo...!)
La cascade gelée avec le bassin où les fous pouvaient aller se baigner !
Mais comme les autres y sont allés et qu'il n'y a pas de raison que vous soyez moins fou qu'un autre, vous y êtes allé aussi !
Non mais...
Bon allez, vous avez fini votre (long) (très long) papotage !
Mais il fallait bien ça pour un tel événement. Surtout que vous écrivez essentiellement pour vous souvenir !
Et cette ascension, c'est pas un truc que vous avez envie d'oublier.
Alors merci Florence de m'avoir embarqué dans ce truc-à-la-con !
(j'ai un peu peur pour le prochain...)
Merci à mon mec qui a financé une très très grosse partie de ce voyage (...je suis en train de réaliser qu'il avait peut-être espéré que je n'en revienne pas ! que je meurs gelé en haut du Kili ou que je me fasse bouffer par un lion.... Non...il ne pourrait pas vivre sans moi !)
Merci à celles et ceux qui ont le courage et la patience de me lire.
Bises
Signé : celui qui a vaincu le Kilimandjaro (alias "Just Done It") et qui va se la péter durant des jours semaines mois années !!!