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1 octobre 2009 4 01 /10 /octobre /2009 07:41
A mon tour. Je vais tenter de me souvenir de toutes ces petites choses qui m'ont ....déboussolé, agacé, fait rire, sourire, serrer les dents, crier, regretter, pardonner, .......fait grandir ?

Jour de pré-rentrée : le directeur nous dit qu'il n'y a pas tout le matériel. Les commandes ont été faites mais....rien n'est arrivé. Le samedi matin, je cours en ville acheter : des stylos, des règles, des gommes, des critériums, des feuilles, des pochettes...

La photocopieuse ne fonctionne que 2 jours par semaine. Et bien tu apprends à travailler sans ! Et quand elle marche, et bien tu photocopies des trucs en avance. A condition de ne pas être trop à vouloir le faire (nous sommes 28 collègues + le directeur). Et quand elle fonctionne, et bien elle se bloque toutes les 15 feuilles en moyenne. T'apprends à réparer. Le directeur nous a donné 5 ramettes chacun pour l'année. Après, ce sera de ma poche !

T'as qu'à utiliser les manuels ! me diriez-vous. Y a pas de manuel, vous répondrais-je...

T'as qu'à tout écrire au tableau ! me direz-vous. Je n'ai accès à ma classe que 10 minutes avant les élèves et j'ai d'autres choses à faire avant qu'ils n'arrivent : sortir les fournitures, les livres (que j'ai achetés) et les crayons et les colles qui sont enfermés dans l'armoire pourrie, remettre les tables et les chaises en place, discuter un peu avec des collègues ou le directeur (ben oui, on a quand même envie de discuter ! du boulot, des trucs à faire, des notes de service de l'inspection, et puis aussi de nous tout simplement, ça fait du bien !). Et il faut aussi que je gère le double niveau pour le tableau. Et le coup de sifflet qui annonce le début de classe arrive toujours avant que je ne sois prêt.


Quand on travaille sur ardoise, je distribue ardoises et craies. Et après je reprends pour tout ranger. Et la dernière fois, un d'eux avait gardé son bout de craie bleue. Un quart d'heure après je jette un oeil sur lui, il avait le visage entièrement bleu. Ca vous fait sourire ? Lui, ainsi que tous ses potes, guettaient ma réaction... Ben, fatigué, j'ai gueulé !

Ah, un truc. Eux, quand tu les remets en place, ils te disent des trucs dans leur langue... Mots d'amour ? Excuses sincères ? Je ne crois pas.... Au début, j'insistais : qu'est-ce que tu as dit ? Ils se bloquent et là vous avez affaire à un mur. Et puis, finalement j'ai laissé tomber. Parfois je leur réponds "mais oui mais oui, moi aussi je t'aime beaucoup" ou alors "toi-même!" ou alors je leur parle en anglais (mais je suis limité au niveau vocabulaire et y a des trucs que je peux quand même pas leur dire, ce sont des enfants...). Ca vous fait sourire ? Imaginez-vous, après 3h30 de classe face à un élève qui vous parle, bien en face, yeux dans les yeux en shimaorais parce que vous venez de lui faire une remarque et le reste de la classe qui pouffe de rire... Moi, je me sens seul. Et il faut que je leur montre (c'est ma façon de réagir, je prends peut-être ça trop à coeur) que je reste maître dans ma classe. Alors je m'impose. Par ma voix, ma présence. Mais c'est pas facile. Il faut avoir de bonnes heures de sommeil. Et c'est pas toujours le cas.

Un élève parle presque aussi fort que toi pendant que tu expliques un truc. Tu t'arrêtes et tu le fixes (regard-qui-tue). Il te regarde (sans s'arrêter de discuter (en shimaorais évidemment)), tourne la tête et continue. Petit flottement. Les autres attendent ta réaction. Tu interviens. "Hé ! , ça ne te dérange pas de parler pendant que je fais classe ?". Il ne te répond pas. Ne s'arrête pas. A peine un regard et il continue. Que dit-il ? T'a-t-il entendu ? Déstabilisant. Alors j'interviens. Physiquement. Je m'approche, le prends par le bras et lui demande de se taire. Il continue à parler avec son voisin ! Tu te sens invisible. Transparent. T'as peut-être pas assez dormi ou alors la chaleur fait son effet. Bref, tu sens la violence qui monte et le petit bonhomme et bien tu l'envoies "vigoureusement" lui et sa chaise au fond de la classe. Rassurez-vous, je ne les frappe pas, ne leur fais pas mal. je m'impose physiquement. C'est bête. Je suis pas très fier. Mais, ayant traîné sa chaise au fond avec lui dessus, je l'isole. Je reprends le contrôle...enfin je crois.
Il continue à marmonner. je laisse tomber.



Un élève sort tranquillement une mangue pour manger en classe. Tu lui dis d'arrêter et d'attendre la récré. Il la range. Trois minutes après il l'a ressortie et est en train de la manger avec les voisins qui ont un grand sourire sur les lèvres. J'explose. Ou pas. En tous cas, je lui prends sa mangue. Mais je ne la jette pas. Je sais que je la lui redonnerai à la récré car c'est peut-être son repas de la journée. Lui, il a 15 ans. Il est en CM2. Ses tee-shirt sont déchirés, tâchés. Il n'est pas en bon ..."état physique". Il ne sait pas lire et parle quelques mots de français. Je dis "mots" et pas "phrases". Et il passe 5 heures dans ma classe chaque jour. Alors oui je m'occupe de lui et de 3 autres qui sont non lecteurs dont un qui parle encore moins bien. Je fais du CP. On voit les sons. Mais, je ne peux leur "donner" que 5 à 10 minutes par jour. C'est peu.

Un jour, je rentre dans la classe. Un gros zizi était dessiné sur le tableau. La porte de ma classe ne ferme pas. En tous cas, j'ai pas la clé. Bon...c'est pas grave, j'efface. Ah....ça s'efface pas. Ils avaient utilisé une craie spéciale. Bon...Je trouve une éponge avec un côté qui gratte, de l'eau et je m'y mets ! Ca m'a pris 15min. Ce jour-là, tu prépares pas ton tableau. Tu sors pas le matériel à l'avance. Et tu sais que tous ces moments un peu "flous" : distribution de matériel, etc... et bien ils en profitent. Ils se lèvent. S'agressent. Crient. Ben qu'est-ce que tu fous Didier ? C'est toi le maître. ah oui c'est vrai...alors je crie. Plus fort. Parce que si je me fige dans une attitude indignée et scandalisée, ils m'ignorent. Alors c'est ma voix qui domine. Je me fais mal. En suis conscient. Mais je ramène le calme.

Ils me craignent.

Je me fais peur, parfois.

La fin de la récré sonne. J'ouvre la porte...et suis presque obligé d'aller les chercher un par un pour qu'ils rentrent. Et puis au bout d'un moment, je ferme la porte. Oui je sais ils ne sont pas tous rentrés. Mais je ne vais pas faire le tour de l'école qui possède pleins de recoins. Cela deviendrait un super jeu pour eux. Chouette un cache-cache avec le maître ! Alors 5 minutes après, ils ou elles arrivent. Un grand sourire sur les lèvres. Ca aussi ça me heurte. Ce côté, je ne montre pas que je suis désolé. Différence de culture ? Alors je leur fais la morale. Si on veut. Bref, je les assieds un moment dans un coin, je ne m'occupe pas d'eux. Je marque le coup, quoi. Pas terrible je sais.



 mon armoire pourrie...














Certains de mes collègues (pas tous!) rentrent eux-aussi 5 à 10 minutes après le coup de sifflet. Leurs élèves aiment bien venir parler avec les miens à travers les fenêtres (pas de vitre, 10 grandes ouvertures sur la cour, juste des barreaux). Et ça fait du bruit. Beaucoup de bruit.

Parfois ils se chamaillent. Et dans ce cas, ils peuvent se courir l'un après l'autre dans la classe.

Depuis les fournitures sont arrivées. Tu commandes pas ce que tu veux. Tu prends ce qu'il y a. Soit. C'est pas très grave. Tu ne choisis pas ce qui correspond à ta manière de travailler. Tu adaptes ta manière de travailler au matériel existant.
Au fait, mes critériums....très mauvaise idée..... Ils ont vite compris qu'avec plusieurs pressions, ils pouvaient faire descendre la mine. Ca les a beaucoup amusés...Moi pas.

Quand un parent veut te voir (c'est rare mais ça arrive), il vient te voir. Quand il veut. En pleine classe. Et bien souvent il ne parle pas bien le français. Alors un élève traduit.

On ne peut pas être sans arrêt dans le frontal. Il faut s'adapter. A leurs coutumes. On est ici chez eux. Mayotte a beau vouloir devenir un département français, ce n'est pas la France.

Dans la tradition africaine, les gens s'invectivent beaucoup. Mes élèves aussi. Ils se parlent (fort) d'un bout à l'autre de la classe. En métropole, ils papotaient mais avec leurs voisins les plus proches !



Reagrdez la place qu'ils ont pour passer les jambes entre la chaise et la table...J'ai renoncé à les faire assoir correctement. Ils font ce qu'ils peuvent !













Le premier jour, ils se sont placés comme ils souhaitaient. J'ai eu toutes les filles d'un côté et les garçons de l'autre ! La classe était séparée en deux !

Le deuxième jour, je les ai placés. Une fille à côté d'un garçon. Ouh là là.....! Jeune M'zungu intrépide et naïf que je suis... Ladi (prénom modifié) n'a pas aimé. Elle me l'a bien montré. Je leur ai montré leur place, et ils s'asseyaient (en rouspétant mais ils le faisaient). Vient son tour. Je lui montre sa place. Elle me dit "non monsieur". Je lui dis que si. Elle me répond "non monsieur". Je lui explique que c'est un ordre et que c'est moi qui commande dans la classe (mes racines de père militaire et grand-père gendarme se mettent à réagir...). Elle refuse. Je hausse la voix. Dans un mélange de paroles fortes (mahoraises), de grands gestes et de cris d'exaspération elle va s'assoir.......à la place située derrière celle que je lui avais indiquée... Je reprends la combat (2ème jour de classe, ils me testent, je le sais....ceci dit, je crois qu'ils vont me tester pendant 8 mois...). J'insiste et donne des ordres, l'air méchant. Elle cède et s'assied là où je lui avais dit. Mais en se mettant à l'extrémité de la table, voire en dehors. Je décide de continuer le combat. Et je lui dis "décale-toi". elle bouge d'un centimètre. Je continue "décale-toi". Encore un centimètre. Et je recommence. Bref, j'ai dû le faire une quinzaine de fois (donc environ 15 cm !) et à la fin, je le disais tout doucelent pendant qu'elle me lançait des regards noirs.
Durant les 15 jours qui ont suivi, elle ne m'a pas adressé la parole. Quand je m'approchais pour travailler avec elle (ben oui, c'est mon job!), elle se cachait la tête dans son foulard. Et chaque matin, elle a tenté de se remettre une place derrière Mais j'ai tenu. Enfin....un jour où elle m'avait énervé (je sais plus pourquoi), j'ai rédigé une lettre pour ses parents (mais là-aussi, pas simple : quels parents ? qui vit à la maison ? quelqu'un s'occupe d'elle ? si oui, pas comme nous on l'entend. Elle doit certainement faire sa part de tâches ménagères et s'occuper des petits frères et p'tites soeurs. ) Bref, un courrier pour les "parents" avec demande de signature.
Depuis, ça va mieux. Beaucoup mieux. On est en paix. Mais ouah...que d'énergie...

Fatou. Ne parle que 3 mots de français. Vous vous imaginez 5 heures dans une classe sans vraiment comprendre ce que le maître mzungu raconte. Sans pouvoir lire. Sans pouvoir s'exprimer. Il s'était installé en fond de classe le 1er jour et le hasard a fait que je l'y ai laissé (je ne les connaissais pas au début). J'avais bien vu qu'il ne comprenait pas. Il recopiait. Vite. et pas trop mal. Et attendait. Et à travers d'autres activités (logique, math, ...) je me suis aperçu qu'il était loin d'être con ce gamin. Et je lui ai dit (pas comme ça mais je crois qu'il a compris). Et il a eu un petit sourire, un peu gêné (des compliments devant les copains, wouha la honte ! mais quand même le mzungu il a dit que je savais des choses). Et bien depuis c'est génial. Il a une soif d'apprendre. Il a compris (c'est pas toujours facile) qu'il ne pouvait pas faire ce que font (tentent de faire ?) les autres. Mais il apprend à lire. Et il en veut. Et moi aussi. Je veux qu'il sache lire. Je veux pas qu'on l'oublie au fond d'une classe. Je veux qu'il sache qu'il vaut quelque chose.

Maro . Pas facile. Visage de tueurs. Ne sait pas lire. Parle pas trop mal français par rapport à Fatou. Habitué à être en échec et traîné de classe en classe. Mais c'est surtout un pauvre gamin. Et pris seul il est plutôt sympa. Oui il fait du bruit. Et lui il arrive pas à rester silencieux quand je fais des trucs qu'il ne peut pas comprendre (et j'ai pas toujours un truc "occupationnel" à lui refiler, et j'ai pas encore pris le temps de leur construire des exos adaptés à leurs niveaux, mes 4 non lecteurs). Donc souvent je lui tombe dessus car il dérange le "groupe classe".

Chadli, CM2. Attitude particulière. Lors des travaux en petit groupe, elle me colle. Me touche volontairement. Je prends de la distance. En rentrant dans la classe, elle passe avec une démarche "aguicheuse", en roulant des hanches et en traînant le pas avec un regard en coin. Rappel à l'ordre. Tu es une petite fille et je suis un adulte. Mais dans leur société, elle pourrait tomber en ceinte dans 1 an ou deux.

Fa, Taou, Syl, Attouma : 4 CM2. Capables de faire rougir de honte des CM2 de l'école de Druye. Travailleurs, bosseurs. Tu leur donnes un exo (un peu dur), ils se mettent ensemble dessus. Et ils ne le lâchent pas tant qu'ils n'y sont pas arrivés. Et ils cherchent vraiment ensemble ! Ils s'aident. Ils s'expliquent. Excusez-moi, j'ai une petite larme d'enseignant qui coule le long de ma joue...

Musique. Moment privilègié. Pas facile. Ils partent vite en live ! Hier, après deux menaces, la séance de musique s'est transformée en séance de copie bête et méchante. Kadi s'est excusé ( y a du progrès !). Mais j'ai tenu.
Sinon les moments de musique sont supers. Ils apportent aux chants ce que des petits métropolitains ne pourront jamais donner ! Ok, Santiano à la mode africaine c'est particulier ! Mais c'est rigolo. C'est des moments où on rigole ensemble aussi. Ca fait du bien.



Arts plastiques. euh...non ! arts visuels ! Là aussi des moments agréables. Ne jamais oublier l'importance de l'art... (à méditer). Certains collègues font français et math car le niveau est désastreux (et c'est vrai ! Je prends des lectures niveau CE1 pour les CM1). Donc pas de sport, pas d'arts, pas de sciences, pas d'histoire. Les gamins doivent exploser. Mais non, car ils sont tenus. Mais c'est dommage.

Kadi. Lui, je sens que je vais l'aimer autant qu'il va me pourrir mes moments de classe... Il ne tient pas en place. Mais vraiment ! Toujours debout. Tu le crois à sa place (car tu viens de l'y remettre de façon énergique), tu rejettes un oeil sur lui et  il n'y est plus ! Il est déjà parti voir un copain (il tentera de t'expliquer la profonde raison qui l'a amené à se déplacer mais tel le méchant maître blanc que tu es tu ne l'écouteras même pas...). Et pourtant lui aussi il sait pleins de choses.  Alors, quand il bosse (ça arrive...il doit être un peu malade dans ces moments-là !) et qu'il ne comprend pas, il vient te voir (oui, lui il ne lève pas la main il se déplace mais bon...j'adapte..) et là il te dit (presque indigné) :"monsieur je comprends pas!". "Ah..et tu veux que je t'aide Kadi ?" "Oui, dit-il d'une petite voix". J'aime bien...

Ils copient tous les uns sur les autres. C'est même une habitude. Je leur ai dit que jamais je ne gronderais si je voyais des erreurs dans leurs cahiers. Et au contraire leurs erreurs me permettent de savoir qui je dois aider. Z'ont du mal à comprendre ce principe... Hier, j'ai pris à part deux gamins pour revoir avec eux les compléments à 100 pendant que les autres faisaient une reproduction de figure sur quadrillage. C'était 2 gamins qui avaient "joué le jeu" et lors de la correction, avaient vraiment mis en vert les réponses. et donc ils n'avaient pas vraiment compris comment on trouvait un complément à 100. On s'est mis en fond de classe, j'ai sorti mon tableau blanc et mes feutres velleda (achetés de ma poche) et on a revu le truc. Moment super agréable. Puis 3-4 élèves sont quand même venus voir ce que je faisais... Intrigués. Et ils ont voulu travailler avec moi aussi. Ils me disaient qu'eux non plus n'avaient pas compris. Ah bon? "Amène-moi ton cahier, j'lui dis". Et il m'apporte son cahier où on voyait que tous les résultats étaient bons mais ré-écris en bleu par-dessus la mauvaise réponse (faut pas me prendre pour un débutant non plus !). Et là, je lui dis : "ben non, regarde t'as tout bon ! Pas besoin que je t'explique alors !" (instit sadique...). Ils ont fait la tête...mais peut-être que maintenant ils seront honnêtes lors des corrections. Peut-être...

Sport. Wouhaou..... J'ai voulu faire une balle assise. (Un ballon, chacun pour soi, quand t'es touché tu t'assieds, voilà en gros le principe).On a vu les règles. C'était clair. On avait fait un exemple.  En métropole, en général, les élèves fuient celui ou celle qui a récupéré le ballon. Là....ils se sont rués sur le porteur du ballon pour le lui arracher...et c'est devenu une énorme mélée avec un p'tit instit blanc qui essayait tant bien que mal d'arrêter tout ça. Ils sont restés assis  10 minutes en silence dans l'herbe pendant que je me contrôlais pour ne pas les assommer....

On recommencera la balle assise. Et cette fois, je les attends de pieds ferme... Boudiou de merde !

Fark. Certainement un petit clandestin. Vu sa tenue. Mais une farouche intelligence. Il comprend à une vitesse ... Lui aussi me donne envie de continuer.

Ne jamais oublier que le français est une langue étrangère pour eux... Ils ne la parlent qu'à l'école. Dans un texte correspondant à leur niveau, ils ne comprendront que 40% des mots.

Et le vice-recteur nous dit qu'il faut appliquer les programmes de métropole. Les élèves mahorais ont droit aux mêmes compétences que les petits tourangeaux... Honnêtement, je ne sais pas si j'aborderai le plus-que-parfait et la proposition relative si déjà ils ne savent pas ce qu'est un gorille et ce que veut dire le mot "sombre"... Je vais agir avec ma conscience, n'en déplaise à mon inspectrice et au vice-recteur ! (l'instit rebelle refait surface...)

Les toilettes des enfants. Je n'y ai jamais mis les pieds. Pour des raisons d'hygiène...

Un truc déstabilisant: ils sont pieds nus ! Même ceux qui arrivent avec des chaussures se dépêchent de les retirer pour sortir jouer dehors. Dans la classe, faut faire gaffe à ne pas leur écraser les pieds...

Ils adorent les livres que je leur ai achetés. Ca me fait plaisir. Des bds (ben oui évidemment), des imagiers sur les animaux (ils adorent !), des magasines, ...

Voilà, voilà...encore beaucoup de choses à dire. Je ne sais pas si je suis arrivé à bien transcrire ce que je vis. Il faudrait rajouter les jets de pierre de gamins qui traînent à l'extérieur, le fait de travailler de 12h30 à 17h30 depuis 6 semaines, la chaleur (et encore il paraît que ce n'est rien par rapport à ce qui m'attend en saison chaude), la pluie sur le toit en tôle (là, tu te tais....ta voix ne pourra jamais couvrir le bruit de la pluie....tu improvises autre choses), la "longue" journée de 5 heures coupée par deux pauses d'1/4 d'heure (et vraiment 1/4 d'heure !), certains collègues qui ne viennent pas bosser parce que....je sais pas mais tu récupères leurs gamins!  L'absence de matériel autre que le minimum vital, l'impression d'être un étranger, la solitude lors des surveillances de récré (mais où sont les autres collègues ?), et puis...encore pleins d'autres choses mais là je sature !

A bientôt,
Didier

ps : oui, certains soirs, je suis rentré en me demandant ce qu'on était venu faire dans cette galère; Oui on est bien payé mais heureusement car sinon je ne sais pas qui viendrait...Et l'argent ne fais pas tout. Oui on se sent impuissant. Et on apprend à faire preuve de beaucoup d'humilité. Oui ils n'ont pas une vie facile, ils vont à l'école coranique en plus de l'école publique, se couchent tard, se lèvent tôt et partagent souvent un matelas avec les frères et soeurs. Oui, tout ça.
Mais on est là. On ne regrette pas. On a fait le bon choix. On en ressortira riche d'une belle expérience.


ps bis : tous les prénoms des élèves sont modifiés...



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15 septembre 2009 2 15 /09 /septembre /2009 19:30
On va y aller petit à petit pour vous parler de mon boulot...
En fait, ce blog va me servir de thérapie !

1er jour de classe (ça remonte à 3 semaines maintenant)
Le directeur siffle la fin des classes (oui, la sonnerie ne fonctionne pas...alors il a investi dans un sifflet....tiens, j'en cherche un d'ailleurs et pas moyen d'en trouver un sur Mayotte ! mais j'ai pas encore fait tous les magasins !)
Donc, sonnerie. Mes élèves s'en vont (bruyamment).
Je range tranquillement les affaires dans la seule armoire de la classe (qui ne s'ouvre qu'à droite car la porte gauche est condamnée, elle a dû être forcée). Je range donc les stylos, les feuilles etc... J'efface mon tableau, je range quelques chaises...Puis je me prépare à corriger quelques cahiers...
Puis quand même, je trouvais tout bien silencieux. Je sors. Plus personne. Normal qu'il n'y ait plus d'élèves me direz-vous. Je prends mes affaires et je vais vers le bureau du directeur. Celui-ci m'attendait, la clé de son bureau à la main, attendant manifestement que je ramène la clé de mon armoire.
Il avait sonné à 17h15 et à 17h28 je sortais donc, bon dernier, de l'école...(sous le regard bienvaillant du directeur mais m'ayant quand même fait comprendre que ce serait bien que je me bouge un peu plus vite par la suite)

Un gros challenge m'attendait : faire la course avec mes collègues pour ne plus être le dernier à sortir !!! Pas facile... Mais comment font-ils ai-je demandé il y a pas si longtemps au directeur (j'étais encore le dernier...). Facile ! m'a-t-il dit. Ils rangent tout avant, préparent les gamins et après attendent le coup de sifflet comme des coureurs sur les starting-blocs ! Ah.....

A Druye, il nous arrivait de nous retrouver tous ensemble après la classe pour corriger les cahiers en buvant un thé ou une bière limonade... ce ne sera pas le cas ici...

Bye,
Didier

ps: y a un jour, j'ai réussi à gratter 3 collègues !
Pis aujourd'hui, comme j'ai fini par sport (j'avais fait préparer les sacs des gamins et ils les avaient pris avec eux dans la cour (ben oui, on peut rien laisser dans la classe sans surveillance sinon on risque de se le faire voler (je n'ai pas la clé de ma classe)) et bien j'étais dans les 5 premiers !! trop fort....

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